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Berce du Caucase, renouée du Japon, séneçon du Cap… Elles portent des noms exotiques et sont souvent belles, très belles. L’arbre à papillons par exemple, avec ses lourdes fleurs violettes, ou encore l’impatiente glanduleuse (!) et ses grappes d’un rouge vineux ont ainsi fait le bonheur de plus d’un jardinier en herbe. Mais il y a un hic de taille: elles ne devraient pas être ici. Sans l’aide de l’homme, de son goût pour les voyages lointains et de son amour pour les beaux jardins, elles seraient restées bien sagement chez elles, à l’autre bout du monde. Mais voilà: après la destruction des milieux naturels, la prolifération d’espèces exotiques est aujourd’hui considérée comme la seconde cause de disparition de la biodiversité dans le monde.

Les plantes envahissantes sont en Suisse

Il est désormais trop tard. Les plantes envahissantes sont parmi nous. Dénuées de concurrents, elles se propagent comme la peste, sont très difficiles à éliminer, et menacent clairement la diversité biologique. Plus grave encore, certaines d’entre elles sont si retorses qu’elles représentent un danger pour les animaux voire les êtres humains. L’immense berce du Caucase? Un simple effleurement de la peau, suivi d’une exposition au soleil, entraîne des inflammations voire des brûlures au deuxième degré. Sans parler de la célèbre ambroisie, ennemi public numéro un de la Confédération, dont le pollen provoque de graves allergies. En avoir chez soi est désormais presque davantage répréhensible que de cultiver du cannabis.

Destruction immédiate des espèces

En vertu de l’ordonnance; sur la dissémination dans l’environnement (ODE), sa présence doit être signalée à la commune ou au canton, et les plantes détruites immédiatement. Le Séneçon du Cap est, lui, soupçonné d’altérer le goût du raisin, et donc du vin, la renouée du Japon, quasi immortelle, déstabilise les rives des cours d’eau… Et la liste est longue. Si la Suisse compte quelque 350 plantes dites néophytes (lire encadré)d’entre elles sont aujourd’hui considérées comme envahissantes, parmi lesquelles 16 sont visées prioritairement par l’ODE

9 millions gaspillés

Si le canton du Tessin est particulièrement touché, la Suisse romande est en train d’assister à une invasion végétale en règle. La berce du Caucase, déjà présente dans les Préalpes, s’attaque aux rives du Rhône, la renouée s’est éprise du Pays-d’Enhaut et des berges de la Venoge, Genève est aux premières loges pour tenter de tenir tête à l’ambroisie… Les autorités ne sont pas restées inactives, mais une véritable coordination peine à voir le jour entre les différents acteurs. Une situation que Pro Natura a décidé de dénoncer. «Une enquête menée auprès de différents experts, de services de l’environnement et de communes, révèle d’énormes lacunes dans cette lutte. Sur les quelque 20 millions de francs dépensés dans toute la Suisse pour lutter contre ces néophytes, environ la moitié reste quasiment sans effets», déplore ainsi Nicolas Wüthrich, porte-parole de l’association. Exemple aberrant de ce manque de cohérence: certains garden centres continuent de vendre des espèces invasives qui sont sur la liste noire de la Commission suisse pour la conservation des plantes sauvages, voire qui sont carrément interdites par l’ODE! «Les cantons ne prennent tout simplement pas assez au sérieux leur rôle de contrôleurs des ventes de plantes invasives», s’emporte Wolfgang Bischoff, chef de projet en protection des biotopes chez Pro Natura.

Les dangers du laurier cerise

Alors que les services des forêts luttent pour éliminer des espèces qui étouffent le sous-bois, des particuliers continuent à acheter, insouciants, du laurier-cerise ou des buddleias. Nous ne remettons pas en cause la bonne volonté des cantons et des communes, mais tout le monde avance un peu en ordre dispersé, il manque une stratégie globale, précise Nicolas Wüthrich. La Confédération doit poser des priorités, afin de mieux investir. Elle a pris du retard dans ce sens, et nous en payons le prix ». Chacun pour soi. L’appareil fédéral s’est certes mis en branle, mais les résultats tardent à se faire sentir. «Ce que Pro Natura propose est aujourd’hui en cours d’élaboration, souligne Gian Retho Walther, responsable du délicat dossier au sein de l’Office fédéral de l’environnement. En avril dernier, le Conseil fédéral a adopté une stratégie pour la biodiversité suisse, qui va donner lieu à un train de mesures.» Il faudra alors identifier les régions particulièrement touchées, définir des budgets, et intervenir de manière coordonnée. En attendant, c’est donc un peu le «chacun pour soi» qui prime dans cette guerre contre l’envahisseur. «A vrai dire, cette lutte n’est pas encore bien organisée au niveau suisse, voire dans le canton, reconnaît Franco Ciardo, en charge du dossier des plantes invasives au sein du Centre de conservation de la nature du canton de Vaud. Il existe de nombreux documents, souvent de bonne qualité, mais ils répètent les mêmes informations un peu théoriques.

Faire le ménage en Suisse

Pour les espèces les plus difficiles à combattre, comme la renouée du Japon, nous manquons d’expériences pratiques réussies, il y a un réel besoin au niveau suisse de faire le ménage et de clarifier la situation. En ce sens, Pro Natura a raison. Maintenant, je ne suis pas d’accord avec eux quand ils disent que les cantons ne font rien. Certains en font beaucoup, d’autres très peu. Vaud est au milieu, mais nous n’avons pas suffisamment de moyens pour cette tâche qui coûte très cher ». Pas de langue de bois pour ce botaniste de formation, car le temps presse. «C’est encore le bon moment pour agir afin d’empêcher l’installation de nouvelles espèces, limiter au maximum le développement de celles que nous ne pouvons plus éradiquer, et ainsi économiser beaucoup d’argent ultérieurement. Attendre ne fera que faire grimper la facture.»

Inventaire des plantes vaudoises

Le canton de Vaud vient ainsi de démarrer sur le terrain un inventaire des plantes envahissantes afin d’avoir une vue d’ensemble de la situation dans le canton, d’identifier les priorités de la lutte et de préciser les coûts que cette lutte implique. Genève l’avait fait avant lui, permettant d’endiguer un débarquement massif de l’ambroisie venue de France. Un détail? dans la région Rhône-Alpes, cette petite plante apparemment inoffensive serait à l’origine d’allergies chez 100 000 personnes. Au Québec, son coût direct sur la santé a été évalué à 49 millions de francs.

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