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Qui ne s’est jamais demandé s’il avait bien éteint les plaques de la cuisinière avant de sortir? Ou s’il ne risquait pas d’attraper une maladie en s’accrochant aux poignées dans le bus? Ou ne s’est jamais dit, à un croisement: «Si le feu passe au vert avant que je ne compte jusqu’à cinq, je réussirai mes examens»? Nous avons tous des manies, des angoisses ou des superstitions. Selon une étude menée en 1978 aux Etats-Unis, au moins 80% de la population a déjà eu des obsessions. Un pourcentage qui pourrait atteindre les 99%, selon certains spécialistes. Rien que de très normal.

«Il est tout à fait courant d’avoir des pensées obsédantes à un moment ou à un autre et de manière passagère», explique le Dr Guido Bondolfi, psychiatre aux Hôpitaux de Genève (HUG). Avoir une idée fixe ou une superstition n’est, au fond, qu’une façon de tenter de garder le contrôle sur ce qui nous échappe – le chaos, l’incendie, la maladie, etc. A condition que cette «contrôlite» n’ait qu’une incidence minime sur le quotidien et ne prenne pas le dessus au point de perturber la vie sociale, précise le spécialiste. «Quand les pensées obsédantes sont récurrentes, qu’elles génèrent une forte angoisse et que, pour apaiser cette anxiété, la personne doit accomplir des rituels qui lui prennent plusieurs heures par jour, la situation est considérée comme pathologique.» La manie devient alors un TOC.

Dès vingt ans

Le TOC, ou trouble obsessionnel compulsif, touche environ 2% de la population. Selon l’Organisation mondiale de la santé, il s’agit de la quatrième maladie psychique la plus fréquente après la dépression, les troubles de la dépendance et les phobies. «Les premiers symptômes apparaissent généralement autour de l’âge de 20 ans, affirme le Dr Bondolfi. Mais il arrive qu’ils se manifestent aussi plus tôt. Les parents doivent être attentifs: si leur enfant se lave très souvent les mains, par exemple, cela peut être un signe.» Si cette affection est chronique, en revanche elle n’est pas évolutive, dans la plupart des cas. «Cela signifie qu’elle ne guérit pas non plus, ajoute le psychiatre genevois. Tout dépend comment l’on voit le verre, à moitié plein ou à moitié vide.»

2% de la population souffre de troubles obsessionnels compulsifs (TOC), selon l’AETOC, association genevoise d’entraide aux personnes atteintes de cette maladie psychique. Le TOC se différencie de la petite manie normale. Il se caractérise par des pensées irrationnelles, désagréables et obsédantes et par des compulsions qui durent plus d’une heure par jour.

Mais il ne suffit pas d’être maniaque du rangement, terrifié par l’éventualité d’un incendie ou perfectionniste pour être un «TOCqué» en puissance. Car si l’on retrouve des obsessions et des angoisses chez tout un chacun, les personnes souffrant de troubles obsessionnels compulsifs, elles, leur consacrent un temps démesuré. Cliniquement, on considère qu’au-delà d’une heure par jour, il y a de fortes chances que la petite manie soit en réalité un TOC. Les malades sont conscients de l’aspect irrationnel de leurs obsessions, mais ne peuvent s’empêcher de se plier à leurs rituels. Ces derniers ne leur apportent d’ailleurs aucun plaisir, juste un soulagement temporaire. Parmi les symptômes les plus fréquents, on dénombre le lavage compulsif des mains, les vérifications incessantes ou la peur de faire du mal à autrui.

Bien vivre avec ses manies

Si l’on ignore ce qui déclenche exactement cette maladie, des traitements existent pour en juguler les symptômes. Une combinaison de deux méthodes a démontré son efficacité dans 50 à 85% des cas: la prise d’antidépresseurs dits «inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine» – en d’autres termes appartenant à la famille du Prozac (ou Fluctine, en Suisse) – associée à une psychothérapie comportementale et cognitive (on confronte le malade à son obsession, par exemple la saleté pour quelqu’un qui a peur des microbes, afin qu’il prenne conscience que l’angoisse provoquée par cette situation n’augmente pas indéfiniment).

Reste que la limite entre la simple maniaquerie et la maladie avérée semble parfois bien ténue. Ainsi, Cristina, Marina, Sylvain, Aline et Pascale, que nous avons interrogés pour ce sujet (voir leurs témoignagesci-dessous) ne se considèrent pas comme «TOCqués».Même si certaines de leurs manies, d’un point de vue médical, peuvent ressembler à la définition des troubles obsessionnels compulsifs. Mais ces cinq personnes vivent toutes bien avec leurs marottes, aussi prenantes soient-elles. Et c’est là le plus important, rappelle le Dr Guido Bondolfi: ce qui différencie un simple «maniaque» d’un malade, c’est que ce dernier souffre de ses obsessions, et fait souffrir son entourage.

65% des adultes souffrant de troubles obsessionnels compulsifs sont diagnostiqués avant l’âge de 25 ans, selon l’AFTOC, association française d’aide aux personnes atteintes de TOC et à leurs proches. Chez 15% des malades, les premiers symptômes se manifestent après 35 ans. Ils peuvent aussi survenir dès la petite enfance (50% avant 18 ans).

Complètement «toc-toc», ces célébrités

Eux aussi ont des manies, des phobies ou des superstitions qui frisent, voire qui tiennent de la pathologie. Mais cela ne les a pas empêchés de faire une carrière remarquable.

DONALD TRUMP L’homme d’affaires américain est tellement terrifié par les microbes qu’il refuse de serrer la main de quiconque. Il évite tout particulièrement les instituteurs, car ces derniers sont en contact physique avec des enfants porteurs de toute sorte de maladies. De même, lorsqu’il prend l’ascenseur, le richissime magnat de l’immobilier ne touche sous aucun prétexte le bouton «rez-de-chaussée»: c’est celui sur lequel se posent le plus de doigts.

ÉMILE ZOLA L’auteur sortait toujours de chez lui du pied gauche. Il souffrait aussi d’une compulsion mathématique qui le poussait à compter les marches des escaliers et le nombre de becs à gaz qu’il croisait sur son chemin. Mieux: l’auteur de Germinal additionnait aussi les numéros des fiacres et des portes pour vérifier qu’il arrivait à un total jugé bénéfique. «Longtemps, les multiples de trois lui parurent favorables. Puis ce furent les sept», racontent Guy Bechtel et Jean-Claude Carrière dans Le livre des bizarres (Ed. Robert Laffont.)

DAVID BECKHAM Le footballeur ne conçoit la vie que d’une manière: propre en ordre. En 2006, Beckham a raconté dans une interview au Daily Mail en quoi consistent ses obsessions: «J’ai besoin que tout soit droit ou en double exemplaire. (…)Quand je place mes canettes de Pepsi dans le frigo et qu’il y en a une de trop pour arriver à un nombre pair, je la sors. (…) A l’hôtel, avant de pouvoir me détendre dans ma chambre, je ramasse tous les prospectus et livres et je les range dans un tiroir. Tout doit être parfait.» Quand il fait ses courses, le sportif achète exactement vingt paquets de nouilles et porte une nouvelle paire de chaussures de foot à chaque match.

RAFAEL NADAL De John McEnroe, qui pinçait systématiquement le bout de sa chemise, à Ivan Lendl, qui s’arrachait les cils lorsque la pression était trop forte, la plupart des tennismen ont des tics. Mais chez Rafael Nadal, ces petites manies font penser à des TOC. Ainsi, les chaussettes de l’Espagnol doivent toujours être à la même hauteur avec le logo de son sponsor parallèle au terrain. Lorsqu’il change de côté, ses deux bouteilles d’eau doivent être alignées devant sa chaise, avec leurs étiquettes perpendiculaires à la ligne du fond de court. Et «Rafa» ne marche jamais sur les lignes.

Où s’adresser

Selon le Dr Guido Bondolfi, 80% des personnes atteintes de TOC ne consultent pas car elles considèrent que leurs obsessions font partie de leur personnalité. Si vos manies sont trop prenantes, n’hésitez pas à vous renseigner auprès de:

ARTOC Association romande de troubles obsessionnels compulsifs, c/o Josine Bosshard-de Haan, 1260 Nyon, tél. 076 504 85 45.

ASPCo Association suisse de psychothérapie cognitive, 1219 Châtelaine, tél. 022 796 39 82, www.aspco.ch. Le site fournit la liste des thérapeutes membres de l’association dans tous les cantons romands.

HUG Programme spécialisé pour les troubles anxieux du Service des spécialités psychiatriques, Médecin responsable: Dr Guido Bondolfi, tél. 022 305 45 11.

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