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De plus en plus de femmes espionnes: qui sont les «M» de la vraie vie?

Espionnes professionnelles femmes de plus en plus nombreuses

Dans le sillage des pionnières, enrôlées à l’époque de la guerre froide, les femmes ont investi tous les postes, analystes, agents de terrain, jusqu’aux plus hautes sphères de la hiérarchie. Un changement de cap assumé par certains services secrets qui ne cachent pas leur volonté de recruter des femmes. (En photo: Tzipi Livni, agente du Mossad dans les années 80.)

© Getty Images

Vous avez remarqué? L’expression «James Bond girl» a presque disparu. L’incarnation virile de l’agent secret revient sur les écrans, mais l’espion de Sa Majesté qui a longtemps trôné au centre d’un univers machiste imaginé par l’écrivain Ian Fleming a beau avoir échappé aux griffes des pires psychopathes, il ne peut rien contre l’époque. Un vent féministe souffle sur le monde du renseignement.

Dans le dernier opus de la saga, Mourir peut attendre, à découvrir le 30 septembre, Bond partage l’iconique matricule 007 avec une femme. Le Britannique avait déjà dû se plier aux ordres d’une directrice, incarnée au cinéma par l’inimitable Judi Dench, mais surtout inspirée par Stella Rimington, la première femme de chair et de sang à avoir chapeauté le MI5, de 1992 à 1996. Dans la réalité, comme dans la fiction, le bastion très masculin du renseignement est en train de changer de visage.

© Getty Images (En photo: Stella Rimington)

Dans le sillage des pionnières, enrôlées à l’époque de la guerre froide, les femmes ont investi tous les postes, analystes, agents de terrain, jusqu’aux plus hautes sphères de la hiérarchie. Un changement de cap assumé par certains services secrets qui ne cachent pas leur volonté de recruter des femmes. Au pays de James Bond, on a pu voir fleurir des annonces qui leur étaient directement adressées, postées sur le site Mumsnet, destiné aux parents, entre des infos sur les biberons et la garde d’enfants. Une manière de s’émanciper de l’image réductrice et testostéronée véhiculée par un Daniel Craig. Même si on l’aime beaucoup.

Suisse

Peu de personnes savent à quoi elle ressemble, car il n’existe pas de photo d’elle. On sait néanmoins que les services de renseignement helvétiques ont nommé pour la première fois de leur histoire une femme à un poste clé officiel. La procureure fédérale chargée du terrorisme Juliette Noto, spécialiste des questions de radicalisation et de djihadisme, a en effet été promue cheffe de l’analyse au Service de renseignement de la Confédération (SRC), en mai dernier.

Une avancée notable dans le domaine de la parité, même s’il est difficile de dire, au vu des secrets qui entourent ces structures, si d’autres femmes gravitent dans l’ombre à des positions élevées. Un rapport du SRC, dont le contenu était révélé par «24 heures» en juillet, faisait ainsi état de 159 femmes pour un effectif total de 400 collaborateurs. Mandaté par le directeur Jean-Philippe Gaudin, le groupe de travail auteur du texte dénonce notamment un climat peu favorable aux carrières féminines et enjoint le service «à se libérer de sa culture sexiste».

France

On entend souvent dire que les Français ne sont pas encore prêts pour une femme présidente de la République. Est-ce valable aussi pour les plus hauts sommets du renseignement? Les structures connues de la DGSE ne mentionnent en effet aucun nom féminin à des postes majeurs officiels. Si plusieurs femmes exerceraient comme cadres stratégiques, notamment à l’étranger, le fort héritage militaire des services secrets français en ferait une maison encore trop masculine.

Pour preuve, seulement 25% des effectifs sont féminins, contre 40% pour le Mossad israélien et près de 50% pour la CIA américaine. Reste que plusieurs espionnes françaises ont fait parler d’elles dans l’histoire récente, à l’instar des agents Christine Cabon et Dominique Prieur, impliquées en 1985 dans l’opération de sabotage du Rainbow Warrior à Auckland, en Nouvelle-Zélande. Le bateau de l’ONG Greenpeace participait alors régulièrement aux protestations écologistes contre les essais nucléaires en Polynésie et inquiétait les pouvoirs français.

© Getty Images (En photo: Dominique prieur)

Allemagne

Remplacer un homme par une femme en période de crise, histoire de calmer les esprits et de donner une image plus probe. Le phénomène est bien connu des sociologues, qui l’ont baptisé la falaise de verre. Est-ce la motivation cachée de la Bundeswehr, l’armée allemande, qui a propulsé Martina Rosenberg à la tête du service de contre-intelligence militaire fin 2020?

Ébranlé par plusieurs affaires de radicalisation survenues en son sein, celui-ci avait en effet décidé de se séparer de son ancien directeur Christof Gramm, mis à la retraite forcée. Quoi qu’il en soit, Martina Rosenberg, brillante juriste puis procureure militaire de 51 ans originaire de Francfort, a le pedigree requis pour s’illustrer à ce poste clé. Elle est la première femme à diriger un Service de renseignement fédéral.

Italie

Elle était déjà la première femme à occuper le poste de secrétaire générale des Affaires étrangères, la plus haute position accessible par un diplomate de carrière en Italie. Elisabetta Belloni, 63 ans, n’a pas fini son ascension: en mai dernier, cette ancienne ambassadrice est devenue la première femme à prendre la tête du Département des informations pour la sécurité (DIS), les services secrets italiens.

Un poste ultra-sensible depuis lequel elle dirige à la fois l’Agence d’information et de sécurité extérieure (AISE), coordonnant les missions à l’étranger, et l’Agence d’information et de sécurité intérieure (AISI), s’occupant notamment du contre-espionnage sur le territoire national.

© Getty Images (En photo: Elisabetta Belloni, à gauche)

Russie

Le KGB, puis le FSB, les services secrets russes, ont toujours été dirigés par des hommes, et leurs effectifs de cadres demeurent très masculins. Pourtant, de nombreuses agentes infiltrées ont défrayé la chronique ces dernières décennies, à l’image d’Anna Chapman et de Maria Butina, de jeunes et séduisantes résidentes démasquées par les autorités américaines alors qu’elles opéraient sous couverture aux Etats-Unis.

© Getty Images (En photo: Maria Butina)

Israël

Le redoutable Mossad, dont on suit notamment, dans un film ébouriffant de Steven Spielberg (Munich), la vengeance minutieuse et implacable contre les instigateurs de l’attentat aux Jeux olympiques de Munich, n’a jamais été dirigé par une femme. L’agence de renseignement extérieur est cependant engagée dans un processus de féminisation de ses effectifs, où de plus en plus de directions d’unités sont confiées à des agentes.

Dans le passé, plusieurs femmes étaient déjà impliquées dans des opérations majeures du Mossad, dont Sylvia Rafael, qui pourchassa jusqu’en Norvège l’un des quatorze responsables désignés des attentats de Munich dans le cadre de l’opération Colère de Dieu. Tzipi Livni (photo en tête d'article), quant à elle, fut agente du Mossad dans les années 80 avant de devenir une figure majeure de la scène politique israélienne.

Etats-Unis

En l’espace de quelques années, les femmes auront conquis inexorablement les plus hautes sphères du renseignement américain. Dès 2013, l’agent Julia Ann Pierson était ainsi nommée cheffe des services secrets chargés d’assurer la sécurité du président Barack Obama en 2013. Quatre ans plus tard, Gina Haspel, espionne rompue aux missions en couverture au Moyen-Orient et spécialiste de l’anti-terrorisme, devenait directrice adjointe de la prestigieuse CIA avec la bénédiction de Donald Trump.

Le très controversé locataire de la Maison-Blanche promut cette femme réputée à poigne, voire sans pitié, directrice tout court dès 2017. Si cette dernière dut démissionner avec l’arrivée de Joe Biden et céder sa place à un certain William Burns, les services secrets n’allaient pas pour autant retrouver un lead 100% masculin: en janvier dernier, le nouveau président décida de confier la direction de l’ensemble du renseignement national à Avril Haines, ex-directrice adjointe de la CIA sous Obama.

Jeune (elle a 51 ans), brillante (elle fut professeure de droit à l’Université de Columbia), cette juriste qui fut un temps gérante de bar est la première femme à chapeauter tous les services de renseignement américains, CIA et NSA compris.

© Getty Images (En photo: Gina Haspel)

Espagne

A priori, rien ne destinait Paz Esteban López, une spécialiste en histoire et littérature médiévale diplômée de l’Université de Madrid, à devenir espionne. Elle a pourtant très tôt rejoint les services de renseignement, évoluant à plusieurs fonctions vouées à l’intelligence étrangère. Après une ascension ininterrompue dans cette sphère très secrète, cette Madrilène née en 1958 est devenue, l’année dernière, la première femme à prendre les rênes des services de renseignement extérieurs espagnols.

© Getty Images (En photo: Paz Esteban)

Chine

Comptant quelque 200 000 agents répartis en une vingtaine de départements appelés «bureaux», les services secrets chinois ne sont pas vraiment une petite structure. Ils n’en restent pas moins très opaques. Et insaisissables. C’est en effet à peine si on connaît l’adresse réelle de leur siège, probablement celle du Ministère de la sécurité d’Etat, à Pékin.

Si des femmes exercent comme agents dans l’espionnage à l’étranger, leur nombre et leurs éventuelles fonctions au sommet de la hiérarchie demeurent bien gardés, dans un milieu où seuls les éléments reniés par le parti communiste chinois sont parfois révélés au grand jour.

Rwanda

Choisie par le président Paul Kagamé, Lynder Nkuranda est devenue, en 2020, la première femme à diriger les services de renseignement extérieurs. Cette diplômée en études sur la paix et les conflits, ayant gravi les échelons de la police rwandaise rapidement jusqu’à occuper le poste de commissaire à la coopération et au protocole, est également la première personne non militaire à chapeauter ces services.

Son prédécesseur, Anaclet Kalibata, était colonel. Sa nomination n’est cependant pas tout à fait une surprise dans cet état parmi les plus paritaires au monde. Au pays des femmes, comme on le surnomme sur le continent africain, le parlement est ainsi à 62% féminin.

Royaume-Uni

Dans la saga des James Bond, de Goldeneye à Skyfall, c’est une femme qui dirige les services de renseignement extérieurs britanniques, le mythique MI6. Mais le personnage de M interprété par Judi Dench ne sera peut-être bientôt plus du domaine de la fiction. En 2018, Alex Young, le directeur actuel du MI6 dans la réalité, a en effet laissé entendre qu’une femme (au nom gardé secret) était bien placée pour prendre un jour sa succession.

Elle ne sera d’ailleurs pas seule dans les hautes sphères: en 2017, le même Alex Young avait déjà révélé que le poste de Q, le spécialiste des technologies dans les James Bond, existait vraiment au MI6 et était occupé par une dame, contrairement aux films de l’espion de Sa Majesté.

On notera toutefois que les sommets des services secrets britanniques n’ont pas toujours été des chasses gardées masculines. Le MI5, le service de contre-espionnage et de sécurité intérieure, a déjà été dirigé à deux reprises par des femmes, Stella Rimington entre 1992 et 1996, puis Eliza Manningham-Buller, entre 2002 et 2007.

© Getty Images (En photo: Eliza Manningham-Buller)

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