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Julianne Moore: sa mère, son inspiration

Ma vie est gérée par une priorité: mes enfants. Ma mère m’a prouvé qu’une femme ne peut pas s’épanouir professionnellement si elle n’est pas heureuse dans sa vie de famille. Il m’a fallu sa mort, il y a quelques années, pour comprendre ça.» Née en 1960, sur une base militaire de Caroline du Nord, Julie est la fille d’un militaire, le juge et colonel Peter Moore Smith, et d’une psychiatre, Anne. Elle a une sœur et un frère cadets, Valérie et Peter.

«Avant mes 20 ans, j’avais déjà vécu dans une vingtaine de villes entre l’Amérique et l’Allemagne, au gré des affectations de papa. L’équilibre familial, c’est maman qui le maintenait. Elle trouvait toujours une solution pour exercer sa profession tout en gardant les valises prêtes, si besoin.»

Avoir un père militaire, c’est aussi, dès la prime enfance, faire connaissance avec l’anxiété. «Je venais d’entrer au primaire lorsque papa est parti pour la guerre du Vietnam. Je pouvais ressentir la peur des adultes, rien qu’en les regardant. Cette angoisse est un sentiment que j’ai souvent cherché à retrouver, avant un tournage, pour me glisser dans la peau d’un personnage.» Cette peur, son père lui a appris très jeune à l’utiliser plutôt qu’à la fuir. «Entre 5 et 18 ans, j’ai connu pas moins de neuf écoles. Ça m’a forcée à m’adapter rapidement. Au lieu de redouter un nouveau groupe d’élèves, j’ai cultivé un don pour m’ajuster à toutes les situations. Une expérience spontanée d’actrice avant même de penser aux arts.»

Seule à Manhattan

En Allemagne, adolescente, Julianne prend ses premiers cours de théâtre. Au désespoir de ses parents qui refusent de l’imaginer dans le show-biz, elle tombe amoureuse des arts dramatiques. «Je n’étais pas une fille sportive, à 16 ans. Mais à peine sur scène, je m’illuminais. Comme je n’avais pas le droit d’arrêter mes études pour le théâtre, je me suis inscrite dans plusieurs facultés aux Etats-Unis. Je rêvais de New York, mais maman a refusé: elle craignait que cette ville soit trop dure pour moi. J’ai donc terminé ma scolarité à Boston.»

Mais c’est à Manhattan que Julie Smith (son nom véritable) s’installe à 22 ans. Seule. Contre l’avis familial. Elle y trouve un job de serveuse. Et décroche son premier rôle quelques mois plus tard. Dans un feuilleton, «As the World Turns», inédit en Suisse.

C’est à l’occasion de ce premier contrat, en 1983, que la jeune fille est forcée d’adopter un nom de scène, pour s’inscrire au syndicat des acteurs américains. «Une comédienne portait déjà le nom de Julie Smith. Alors, pour rendre hommage à mes parents, j’ai pris pour nom le second prénom de mon père et ajouté au mien celui de ma mère. C’est ainsi que Julianne Moore est née. Mais tout le monde m’appelle toujours Julie!»

Lorsqu’elle rembobine le film de sa vie, Julie-Julianne évoque 2009 comme l’une des années les plus douloureuses. Celle du décès d’Anne, sa mère. «Elle s’est couchée un soir et ne s’est pas réveillée le lendemain. Perdre si brutalement cet être cher m’a fait réaliser que tout n’est que chaos. On a l’illusion d’un quotidien ordonné, mais il suffit d’un grain de sable pour tout remettre en question.» Ce grain de sable, un choc septique suite à une infection bactérienne non décelée par les médecins, a tranché net la foi que Julianne avait en Dieu. «Je crois en la thérapie. La mienne dure depuis plus de vingt ans et m’a permis de ne jamais perdre pied. Ça s’arrête là.»

Pendant la préparation de «Still Alice», «je n’arrêtais pas de penser à ma mère. Le plus important, lorsque l’on apprend que l’on est affecté par la maladie d’Alzheimer, c’est de vivre dans l’instant présent. Perdre une partie de sa mémoire, avoir des trous dans son sentiment d’identité, vous force à profiter de chaque instant. Car personne ne peut vous dire de quoi demain sera fait.» Pour aborder ce rôle, la comédienne a discuté avec plusieurs femmes touchées par ce mal. Certaines avaient juste la quarantaine. Elle a aussi rencontré la directrice du département de recherche sur Alzheimer de l’Hôpital Mount Sinai de New York. «Et puis j’ai passé le test neuropsychiatrique – que je recommande à toute femme ayant des craintes à ce sujet – pour connaître l’état de ma mémoire. Mes résultats étaient banalement normaux.»

Hier, demain... La question qui agace le plus l’actrice est aussi la plus anodine. Lui demander quels sont ses projets, c’est être sûr de s’attirer, en guise de réponse, un profond soupir. «Mon seul projet est de passer du temps avec mes enfants. Ils sont à la fois jeunes et à un âge où je les vois grandir trop vite.» Pour Caleb, 17 ans, et Liv, 12 ans, Julianne refuse de quitter Manhattan plus de deux semaines. Elle favorise les tournages dans les environs de New York, histoire de rejoindre chaque soir les siens dans leur quartier de Greenwich Village. «Avant de rencontrer mon mari (ndlr: le réalisateur Bart Freundlich), je vivais à Los An geles et j’étais obsédée par ma carrière sans me sentir jamais satisfaite. Il m’a fallu des années de divan pour comprendre que tous les films de Hollywood ne suffiraient pas à me combler. Ma quête du bonheur ne visait pas un oscar, mais une famille. Je voulais des enfants, et il était hors de question que je fasse des compromis. On parle souvent de comédiennes qui craignent de tomber enceinte par peur qu’on les oublie ou qu’on ne veuille plus d’elles au cinéma. Moi je ne me suis jamais posé cette question. Mon but était d’être mère et, si cela avait voulu dire arrêter le cinéma, je l’aurais fait. J’adore être maman! C’est l’expérience la plus formidable de mon existence. Aucun rôle, aucun film n’aurait pu être plus important.»

En réaction à son enfance itinérante, Julianne a voulu recréer des racines familiales fortes. Une vie stable sur la côte est des Etats-Unis. «Mes frère et sœur sont à moins d’une heure de voiture de chez nous, mon père est à peine plus loin, toute la famille de mon mari vit à Brooklyn et nos enfants sont de vrais New-Yorkais. Leur école est à quelques minutes à pied de la maison... Je fais tout pour garder mon petit monde proche le plus longtemps possible», ajoute-t-elle dans un clin d’œil.

Madame le Président

«Dès mes débuts dans le métier, ma mère m’affirmait que je pouvais être une bonne maman tout en poursuivant ma carrière. Il m’a fallu longtemps pour réaliser qu’elle avait raison. Comme toutes celles qui travaillent, j’ai appris à choisir mes priorités et à organiser mes activités pour être heureuse à la maison et dans mon job.»

Organiser: son dada. «Pour rire, nos enfants m’appellent «Madame le Président», car c’est moi qui gère les choses difficiles: les rendez-vous chez le dentiste, les cours de rattrapage avec un prof… Avec un père militaire, j’ai appris à être un peu raide quand c’est nécessaire. Mon mari est plutôt le coach avec qui on s’amuse et fait du sport. On s’est réparti les rôles! Comme mes parents dans mon adolescence, je fais tout pour suivre de près mes enfants, pour leur éviter les pièges. Mes parents étaient protecteurs, présents, mais aussi ouverts d’esprit. Je fais tout pour m’intéresser aux passions de Caleb et de Liv, inviter leurs amis à la maison pour les connaître… Il s’agit d’être là sans les étouffer, pour qu’ils apprennent graduellement à être indépendants et responsables. Si j’arrive à leur transmettre ces leçons apprises de leurs grands-parents, ce sera formidable.»

Curriculum vitae

1960 Julie naît le 3 décembre, sur la base militaire de Fort Bragg en Caroline du Nord.

2003 Après sept ans de vie commune, elle épouse le metteur en scène Bart Freundlich. Ce deuxième mariage est le bon.

1997 et 2002 Naissance de son fils Caleb, le 4 décembre, lendemain de son 37e anniversaire. Puis de sa fille Liv, le 11 avril 2002.

Questions d’enfance

Odeur d’enfance Le parfum de ma mère. Toute mon enfance, elle a porté «Je reviens», de Worth. Une eau de toilette fleurie, très populaire dans l’Amérique des années 50-60, avec des notes de fleur d’oranger, de jasmin, de bergamote, citron et violette.

Mon légume détesté Les petits pois. Je suis incapable d’en manger aujourd’hui encore. J’en décèle l’odeur jusque dans une soupe de légumes, même si l’on m’assure qu’il n’y en a pas.

Mon premier amour Un garçon, en Allemagne, lors de mes premiers cours de théâtre. Mais c’est resté platonique.

Mon dessert enchanteur La tarte aux cerises de ma grand-mère. Aucune tarte ne m’a jamais paru aussi réussie que celles de mon enfance.

Mes premières vacances A Panama, où nous habitions lorsque j’étais petite. Je me rappelle ces plages où je me baignais, avec papa. Il y avait des filets pour retenir les requins et je n’avais pas le droit d’aller seule dans la mer. J’ai ainsi appris à nager main dans la main avec mon père.

Un vêtement dont j’étais fière Je n’ai jamais été dingue de fringues, même adolescente. Jeune, ce n’est pas un pantalon ou une robe qui a changé ma vie: c’est une paire de lentilles de contact. Quitter mes horribles lunettes a transformé le regard des autres sur moi.

Ma douceur préférée Le caramel. J’adore cette odeur dans les gâteaux, dans les bonbons quand j’étais enfant. Encore aujourd’hui, j’ai toujours des caramels dans mon sac à main.

Mon jouet favori Ma poupée Diana, reçue à 3 ans. Elle marchait toute seule. Il y avait un bouton dans le dos. Je la posais par terre et j’allais m’asseoir à l’autre bout de la pièce. Diana avançait vers moi, et je l’attrapais pour la serrer dans mes bras lorsqu’elle arrivait à mes pieds.

Mon héros préféré Stephen King. Je n’ai jamais été attirée par les super-héros, mais j’adore les livres qui mélangent angoisse et terreur.

Julianne Moore dans les années 1960
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La petite Julie Smith, années 1960.

© DR
Julianne Moore et Stece Bassett dans As the World turns
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En 1987, pour le feuilleton «As the World Turns» (ici avec Steve Bassett), son premier rôle professionnel; Julianne Moore est née!

© Keystone
Julianne Moore sur scène à l'école
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Années 1970, la lycéenne découvre les joies de la scène.

© DR
Portrait de Julianne Moore en 1979
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1979, fin de la High School, à Francfort, Allemagne.

© DR
Julianne Moore et son frère Peter en 2012
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Au bras de Peter, son frère, en mars 2012.

© IreImage/Getty/Paul Morigi
Julianne Moore avec sa fille Liv et sa soeur Valérie
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Dans les rues de Rome en décembre 2014, avec sa fille Liv et sa sœur Valérie.

© Ernesto Ruscio/GC Images
Portrait de julianne Moore
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Julianne Moore.

© Carolyn Cole/Contour by Getty Images

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