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Ce n’est que lorsque notre fille a eu 2 ans et demi que nous avons commencé à nous interroger. Jusque-là, tout allait bien: c’était une enfant très facile, qui jouait seule. Elle s’était mise à dire quelques petits mots et à chantonner. Mais certains signes nous ont alarmés, et son comportement devenait de plus en plus difficile à gérer. Notre pédiatre nous a conseillé de faire un bilan pédopsychiatrique avec un spécialiste. Celui-ci nous a affirmé qu’il n’y avait aucun problème et qu’Elise «sortirait de son monde quand elle en aurait envie».

Mais à son entrée au jardin d’enfants, la situation s’est aggravée. Elle restait en retrait du groupe et faisait des crises. Nous nous sommes alors rendus au service universitaire de psychiatrie pour enfants et adolescents (SUPEA) du CHUV, où notre fille a subi un test spécifique (le PEP-R). Après presque une année de lutte pour obtenir un diagnostic, le verdict est tombé: comme nous le soupçonnions, elle était atteinte de troubles de l’autisme. La douche froide. Mais paradoxalement, nous avons été soulagés de pouvoir mettre un nom sur ce qui arrivait. D’une certaine façon, cela nous a permis de mieux accepter la situation.

Une scolarité mixte

Pour «apprivoiser» ce handicap, nous nous sommes renseignés en lisant des ouvrages et en consultant des forums sur internet. Nous nous sentions livrés à nous-mêmes, car il y a une dizaine d’années il n’y avait pas encore d’encadrement prévu pour les enfants autistes légers. Elise a des compétences très variables, elle a par exemple une excellente mémoire. Nous avons souhaité trouver la meilleure solution pour elle, qui lui permette à la fois de se sociabiliser et de gagner en autonomie.

A 4 ans, elle a intégré une institution spécialisée deux matins par semaine tout en suivant l’école enfantine classique deux autres demi-journées. Nous voulions qu’elle reste le plus possible en contact avec des enfants «normaux». Pour sa rentrée à l’école communale, nous avons demandé à la commission scolaire la possibilité de l’intégrer de façon partielle, afin qu’elle puisse bénéficier d’un double enseignement. Malgré des discussions en amont, cette intégration s’est révélée difficile. Pour pouvoir maintenir Elise à l’école normale, il a fallu qu’une éducatrice de son centre l’accompagne durant les cours. En dépit de ces difficultés, notre fille a tout de suite été très bien accueillie par les élèves de la classe. Dès qu’elle arrivait, toutes ses camarades voulaient s’asseoir à côté d’elle!

Une grande organisation

Dès le départ, nous avons pris le parti de communiquer sur le handicap de notre enfant, ce qui a d’ailleurs favorisé la création d’un réseau autour de nous. Les petits voisins nous tenaient informés des «fugues» d’Elise et n’hésitaient pas à la ramener à la maison. Nous avons pu maintenir une scolarité mixte en primaire avec trois jours par semaine dans une institution, et les deux suivants à l’école publique. Afin que cette intégration se passe au mieux, au début du cycle, en accord avec les enseignants, nous nous sommes rendus en classe pour expliquer aux élèves ce qu’était l’autisme et ce que cela représentait dans la vie de tous les jours.

Grâce à ces explications et à la collaboration de chacun, l’adaptation sociale de notre fille s’est très bien passée. En plus, elle impressionnait ses camarades et ses enseignants avec ses excellents résultats scolaires. Une auxiliaire de vie accompagnait Elise durant les leçons pour l’aider à gérer les tâches à accomplir et pour ne pas qu’elle perturbe la classe avec certains comportements. Des professeurs, dubitatifs au départ, nous ont confié par la suite que la présence de notre fille avait transformé la dynamique de la classe: il s’est créé un esprit de solidarité et d’entraide entre les élèves, qui étaient plus soudés que jamais.

Un coût élevé

Cette scolarisation mixte a été très bénéfique: elle a permis à notre adolescente d’acquérir des compétences scolaires, mais aussi sociales dans une petite structure adaptée à ses besoins avec des éducateurs spécialisés. Ce système lui a profité doublement, car elle a pu mettre en pratique ce qu’elle apprenait en théorie dans son institution. Toutefois, la coordination entre les deux infrastructures a nécessité une grande collaboration entre les différents intervenants, car Elise doit rattraper les cours qu’elle manque en classe. Tout est consigné dans un cahier de communication où les professeurs, les éducateurs et nous-mêmes échangeons les informations pour assurer le suivi.

L’assistante de vie, présente durant la plupart des leçons tout au long de sa scolarité à l’école publique, s’est révélée être un accompagnement indispensable. Mais qui n’est pris en charge que partiellement. L’année dernière, ce poste nous a coûté 25 000 francs. Une somme considérable que d’autres familles dans la même situation que nous n’ont pas les moyens de sortir, ce qui signifie que leur enfant est condamné à rester en institution. Cela nous révolte, car c’est de la discrimination: les parents ne doivent pas payer de leur poche pour que leur progéniture puisse aller à l’école.

Un apprentissage de fleuriste

Aujourd’hui, Elise a 15 ans. Elle vient de terminer sa dernière année préprofessionnelle. Nous sommes contents du chemin parcouru: elle a beaucoup gagné en autonomie, et elle a 5,5 de moyenne générale. Quand elle était petite, nous ne savions pas à quel niveau elle pourrait accéder. Cela a valu la peine de se battre pour qu’elle puisse suivre une filière adaptée à son potentiel. Notre fille souhaite devenir fleuriste, elle a récemment fait un stage chez une professionnelle. Celle-ci s’est montrée ravie et lui a fait un rapport très positif. Nous cherchons actuellement une place d’apprentissage dans le domaine de l’horticulture, afin que notre ado continue sa formation. Elle a soif d’apprendre et se projette dans l’avenir comme une adulte autonome, ce qui nous réjouit.

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