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J’ai dansé dans la troupe de Beyoncé

Femina 48 Temoin Danseur Beyonce

Avec les acclamations du public, je sens le plateau vibrer sous mes pieds.

© Guillaume Perret

Si on m’avait dit qu’un jour je danserais aux côtés de Beyoncé, jamais je ne l’aurais cru. La réalité a d’ailleurs dépassé tous mes rêves. La danse est entrée très tôt dans ma vie: j’ai pris mes premiers cours avec ma mère dans sa classe de jazz dance. C’était pour moi un loisir comme un autre, tout comme le squash.

Direction les Etats-Unis

A 16 ans, j’ai saisi l’opportunité de faire un échange scolaire d’un an aux Etats-Unis. Je me suis retrouvé dans une famille d’accueil à Los Angeles, et j’ai intégré un collège américain où j’avais la possibilité de pratiquer mon art tous les après-midi. Un jour, je vois dans le journal qu’une audition est organisée pour intégrer la Debbie Allen Dance Academy… du nom de celle qui incarne la prof intransigeante dans le film et la série télévisée «Fame» que j’ai regardée durant toute ma jeunesse! C’est l’occasion rêvée de rencontrer en chair et en os cette personnalité que j’admire. Je m’y rends donc, vêtu d’une tenue de hip-hop, et je me retrouve dans une salle avec des danseurs en justaucorps et en tutu. Un professeur nous fait apprendre une chorégraphie que nous devons reproduire. L’audition tourne à la farce car je n’ai jamais suivi de cours de danse classique. Je décide de partir, honteux de ma prestation, et déçu de n’avoir pas pu voir l’héroïne de «Fame».

Mais alors que je suis dans le couloir, une personne m’arrête pour me parler: c’est Debbie Allen! Elle m’amène dans une autre salle où a lieu une audition de hip-hop. Sous ses yeux, j’exécute les pas que je viens d’apprendre avec les autres candidats. Elle me stoppe et me fait sortir du groupe. Comme je ne comprends pas très bien l’anglais, je ne sais pas ce que cela signifie. C’est quand les autres se jettent sur moi pour me féliciter que je réalise que je suis admis dans cette prestigieuse institution. Après l’école «normale», je fais 6 heures de jazz, claquettes, danse classique, etc. Le niveau est très haut, je mets donc les bouchées doubles, et Debbie me prend sous son aile. Un jour, elle me fait la surprise de m’offrir un petit rôle dans une comédie musicale à Washington. Ma première expérience sur une scène US.

Dans les rangs pour la Madone

Comme la chance semble être de mon côté, je décide de prolonger mon aventure américaine. J’emménage en colocation avec un danseur plus expérimenté. Celui-ci m’encourage à me présenter à une audition pour… Madonna. Sans agent pour me représenter, et face à 5000 candidats tous plus motivés les uns que les autres, je sais que je n’ai pratiquement aucune chance de figurer parmi les 12 élus. Le casting est impitoyable et les éliminations s’enchaînent. Je suis surpris d’être encore là à la fin de la première journée. Après plusieurs jours de sélection, je me retrouve parmi les 20 derniers. Madonna vient nous voir afin de faire le choix final. Elle nous dit avoir besoin de gens capables de faire des acrobaties, car le thème de son spectacle est le cirque. Je ne peux pas rivaliser avec certains concurrents qui ont des talents de jongleur ou d’acrobate, mais je suis heureux d’être allé aussi loin, moi le petit Suisse de 17 ans.

Lors d’un cours de danse, je rencontre le chorégraphe de Beyoncé, qui me présente au chorégraphe de Michael Jackson. Je suis en plein rêve! Tous les deux apprécient mon style «de blanc qui danse comme un black». Ils me convient à une répétition car ils recherchent un danseur pour la tournée de Destiny’s Child. Après ma prestation, ils me disent de revenir le lendemain. C’est quand je me retrouve intégré au groupe que je réalise que je vais faire la tournée avec le trio. Mais le plus fou, c’est quand je découvre que je suis le partenaire de… Beyoncé. Je vais me produire à ses côtés devant un stade de 80 000 personnes lors du Super Bowl. Cet événement sportif est regardé par 33 millions de téléspectateurs. Durant les répétitions, je découvre des artistes accessibles et hyperprofessionnelles. Le jour du show, je circule à bord d’une limousine sur une autoroute fermée à la circulation, sous escorte policière. Alors qu’il pleut durant les répétitions, comme par miracle cela s’arrête quand nous entrons en scène. Avec les acclamations du public, je sens le plateau vibrer sous mes pieds. Je suis mort de peur mais tout se déroule bien.

Le revers de la médaille

Après plusieurs dates à travers les Etats-Unis avec les Destiny’s Child, je me produis sur des plateaux télé, notamment «The Oprah Show». J’accompagne Kelly Rowland au Japon pour les MTV Video Music Awards. Je vis des moments incroyables: je voyage en jet privé, je rencontre des célébrités en coulisses. J’ai aussi la chance de participer aux clips de Nelly Furtado et d’Enrique Iglesias, et je tourne une publicité avec Mariah Carey.

En apparence, je mène une vie de rêve. Mais je rame, car les cachets de danseur sont misérables. Je dois cumuler plusieurs petits boulots et donner des cours de hip-hop pour survivre. Avec mon colocataire, nous devons faire face à l’électricité coupée, aux menaces d’expulsion pour un loyer en retard, et il n’est pas rare que le frigo soit vide. Le décalage entre l’univers de paillettes dans lequel j’évolue et ma réalité quotidienne est énorme. Si, au début, ma motivation était le plaisir de danser, au fur et à mesure j’accepte des contrats pour pouvoir payer mes factures.

La troisième année, je me retrouve face à un dilemme: accompagner les Destiny’s Child sur leur tournée mondiale ou travailler à l’élaboration des chorégraphies en tant que danseur et acteur sur le tournage d’un film musical réalisé par Chris Columbus. Comme la production me propose un permis de travail de 3 ans, j’accepte cette dernière proposition.

Après 6 ans aux Etats-Unis, je ressens le besoin de faire une pause et je reviens en Suisse. Je réalise que ma place est désormais ici. J’ai mis de côté la danse et j’ai repris des études d’ambulancier pour faire un métier tourné vers les autres, où je me sens utile. Car au fond, être danseur professionnel n’a jamais été mon rêve. Mais je ne regrette pas ce que j’ai vécu car toutes ces expériences m’ont permis de mûrir et d’être celui que je suis aujourd’hui.

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